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Le "Model 1841 Percussion Rifle" ... appelé Mississippi Rifle
Bonjour à tous,
Aujourd'hui, je viens vous parler d'une arme rarement rencontrée mais que j'ai déjà évoqué ici.
Une arme qui m'a permis de découvrir puis de me perfectionner dans le tir sportif aux armes anciennes.
Plus précisément le tir dans les disciplines debout à bras francs à 50 mètres Lamarmora et Camerone / Sebastopol.Voici mon fusil, la réplique de chez Euroarms du fusil Mississippi Rifle, calibre .54 :
Voici un vrai (la source de la photo est visible) :
J'ai acheté le fusil d'occasion en Mai 2010 (sur un forum dédié à la Poudre Noire) .
Avant de vous présenter mon fusil de plus près, je vous propose ce petit aperçu de son histoire :
En Mars 1839, Benjamin Moor, Master Armorer à l’Arsenal de Harpers Ferry reçut la mission de concevoir un fusil rayé à percussion destiné à l’équipement de l’Armée.
Il était précisé que les fusils devait avoir «des pièces interchangeables, et que la standardisation de la fabrication devait se faire par l’utilisation de jauges de vérification.»
En Mars 1840, l’arsenal de Harpers Ferry présenta à l’Ordnance Department un prototype de fusil rayé à percussion. L’arme fut testée jusqu’en Janvier 1841, puis remise à l’arsenal pour modifications.
En Février 1841, le fusil était adopté en tant que Model 1841 Percussion Rifle. Une présérie fut fabriquée par l’Arsenal de Harpers Ferry.
En 1842, l’un des exemplaires de présérie restant fut soumis à plusieurs séries de tests à l’Arsenal de Washington afin de déterminer la portée, la précision et la pénétration des balles.
A l’occasion de ces essais, des tirs furent conduits afin de comparer l’arme avec :
- le fusil rayé anglais Brunswick
- le prototype français de Delvigne (designé « Chamois Hunter »)
- le fusil réglementaire suisse
Le Model 1841 Rifle de Harpers Ferry remporta ces tests comparatifs.
Le démarrage de la fabrication du fusil sera beaucoup plus tardif et la fabrication proprement dite fut marquée par plusieurs modifications successives concernant les cheminées, les garnitures et enfin l’introduction de l’acier fondu pour le canon (Fin 1851).
A noter que d’autres modifications concernant un peu plus d'un millier d'armes furent également faites à Harpers Ferry : hausse réglable, support pour un sabre-bayonette.
Entre 1844 et 1855, un peu plus de 92000 fusils Mod 1841 furent fabriqués, principalement à Harpers Ferry mais aussi par l’industrie privée : Remington, Eli Whitney, Robbins & Lawrence, etc …
Lors de la guerre civile, le fusil fut utilisé par les deux camps.
L’armée Confédérée fit réaléser la plupart de ses fusils 1841 au calibre de .58 et 3 rayures, afin de simplifier sa logistique (Utilisation de fusils d’origine US et anglais)
Source : American Military Shoulder Arms Vol. III par G. D. Moller
L’appellation de « Mississippi » de ce fusil remonte à la guerre mexicaine de 1846-48 qui vit la naissance de l’État du Texas, lorsque le 1st Regiment of Mississippi Volunteers (commandé par le colonel Jefferson Davis, futur dirigeant des États Confédérés) se distingua lors des batailles de Monterrey et de Buena Vista. Pour honorer les vétérans de ces combats, le Gouverneur de l’État du Mississippi et le Secrétaire de la Guerre autorisèrent les soldats à conserver leur arme (moyennant retenue sur leur solde…).
Dimensions et présentation du fusil :
Calibre : .54 (13,7 mm)
Poids : 9 1/2 lbs (4,7 kg)
Longueur : 48 3/4“ (1,24 m)
Canon rond présentant deux pans au tonnerre, bronzé brun, long de 33“ (83,8 cm).
Rayures : 7 au pas de .66“ (1,67 m)
Culasse vissant sur le canon et portant la masselotte de cheminée.
Cran de mire en V profond, monté à queue d’aronde, guidon à lame.
Baguette de chargement en fer, bout fileté, se terminant par un insert conique en laiton.
Platine classique, à percussion, jaspée ou polie blanc retenue par deux vis traversantes sur contreplatine en laiton.
Grand ressort en avant, à chaînette. Noix à deux crans retenue par une bride de noix à deux piliers.
L’avant de la platine est marqué de l’aigle américaine surmontant les initiales US.
La mention Harpers Ferry et la date de fabrication est frappée sur l’arrière de la platine.
Monture d’une pièce en noyer huilé, garnitures à la française retenues par ressorts à ergots.
Plaque de couche, sous garde, pontet, contre-platine, capucine et embouchoir en laiton.
A noter la présence d’une patch-box en laiton sur la crosse prévue pour une cheminée de rechange, un tire-balles, un tire-chiffon et plusieurs curettes.
Hormis le bronzage du canon et la patch-box, l’apparence générale de l’arme et la forme de la crosse rappellent immédiatement les fusils réglementaires français type 1777/1822. Les productions US ultérieures seront davantage inspirées par les armes anglaises, notamment les fusils Enfield Pattern 1853.Je reviens à mon fusil.
On est immédiatement frappé par sa présence.
Tout en sobriété, massif, compact, lourd, sombre ... inquiétant comme une arme de guerre.
C'est plutôt une arme d'homme, pour paraphraser L. Ventura dans "les Tontons Flingueurs".Portrait vu de droite et de gauche. L'arme est vraiment compacte.
Une finition irréprochable, des ajustages serrés, aucun jeu nulle part. La grande classe. :La platine, son marquage à l'aigle Américaine surmontant les initiales US. La platine supporte la masselotte et participe de la solidité de l'arme :
Le chien, la masselotte et le cran de mire :
La crosse et sa patch-box en laiton renfermant un tire-balle, un tire-chiffon, une cheminée de rechange et plusieurs curettes en bambou.
La forme générale de la crosse ainsi que sa pente sont directement héritées des armes réglementaires françaises.Voici l'ogive minié Lyman de 340 grs que je tire sur une charge de Suisse n°2 de 40 grs.
À ce propos, il faut noter que, dans un canon rayé et à chargement par la bouche, le tir de projectiles expansifs creux - les miniés - permet un forcement optimal dans les rayures et un tir très sobre en poudre. Comparé aux longues balles à compression calibre .455 avec lesquelles on est obligé de charger 1/3 de plus en poudre ...Un tir ou l'on distingue bien la percussion de l'amorce et la flamme de départ du coup.
La position est celle en vigueur aux ADF :Je lui ai préparé un coffre, m'inspirant des coffrets pour revolvers avec leurs cloisons :
Il en faut des accessoires pour tirer avec ce fusil :
- Une baguette de chargement / nettoyage en fibre ou en alu avec un jeu de brosses en laiton, un pousse-balle, un tire-balle, un tire-chiffons, le tout se vissant sur la baguette.
- Une bombe d'huile et un flacon de dissolvant spécial poudre noire.
- Des patchs de nettoyage et des chiffons propres.
- Une clé à cheminée, des cheminées de rechange avec un foret pour les déboucher.
- Une pince universelle, deux tournevis plats, un canif, une vieille brosse à dents.
- Une boîte pour ranger les ogives, une boîte pour ranger les charges de poudre, une boîte d'amorces à ailettes.
- Un carnet pour noter les éléments de chaque tir. Et, s'il reste de la place, une petite paire de jumelles.Enfin, voici deux cartons. Je précise que ces tirs étaient à l'entraînement ...
Le Mississippi est une arme redoutable en terme de précision, rattrapant les erreurs d'un tireur assez moyen.
Un tir debout à bas francs à 50 mètres :Un tir couché, cette fois à 100 mètres, discipline Minié/Poncharra :
En conclusion, le fusil Mississippi est une arme incroyable.
D'aspect sombre et massif, il est plutôt lourd.
Les éléments de visée sont simplifiés au maximum.
Le canon est une merveille avec ses 7 rayures et ses parois super étoffées.
Le fusil monte vite à l'épaule, il est bien stable, et sa prise de visée très aisée. Il relève très peu. La détente est douce.
Le chargement est très aisé, la baguette descend gentiment la balle et on ne constate l'encrassement que vers le 10e coup, et encore, ça descend quand même très bien.Moins sexy qu'un Zouave, à mon sens il est bien plus ergonomique avec son cran de mire profond au raz du canon. Bien plus stable avec son poids. Bien plus précis aussi, 7 rayures obligent.
Coaché par un excellent tireur ADF, je lui dois de ne pas avoir tout envoyé promener, car la discipline minié est terrible. En particulier dans ces moments de découragement ou "rien ne rentre" et ou il faut encore analyser le tir et continuer à s'entraîner.
Toujours j'ai pu me raccrocher aux sensations du tir. C'est vraiment quelque chose d'unique, un énorme plaisir. Si ce plaisir n'est pas là ...
Avec ce fusil, j’ai tout appris en matière de tir aux armes anciennes.
De la prise de visée au lâcher, de la position du corps à la respiration, de la fonte des balles au tri, du choix de la poudre au poids de la charge, en passant par l'utilisation d'un four, le choix du plomb, le fluxage, le graissage, le recalibrage, le nettoyage ...Comme tous les tireurs aux armes anciennes sur minié, il m'a fallu des dizaines et des dizaines de tirs avant de composer la formule charge-balle idéale pour mon fusil. Mais aussi pour ajuster les éléments de visée. Un bon moment pour comprendre l'arme, pour ressentir son comportement.
J'ai essayé plusieurs types de balles en commençant par une grosse DP bien lourde (560 grs de mémoire), puis une balle ronde ... pour finir par adopter cette minié Lyman très légère. Laquelle n'est malheureusement plus sur catalogue depuis longtemps.
Tout comme ce fusil devenu collector.
Euroarms a disparu.
Depuis, le Mississippi est produit chez Pedersoli, mais à des prix ... stratosphériques. Et la finition n'est plus ce qu'elle était ...Si jamais vous dénichez un Mississippi Euroarms au détour d'une bourse : n'hésitez pas et achetez le. Après ce ne sera que du plaisir.
A bientôt
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Commentaires
bonjour
tres belle histoire, on sent que vous et votre fusil allaient etre inseparables
bonne continuation et prenez bien soin de vous
Merci cher Gilles ... et peut-être à se rencontrer à l'occasion d'un challenge ... ?
Bien à vous.