• Depuis 1821, les officiers d'Infanterie étaient porteurs d'un très beau sabre dont nous avons présenté un exemplaire ici.

    Cependant, les sabres Mle 1821 accusaient un certain manque de solidité. En particulier la lame, très élégante, mais plutôt fragile. Aussi en 1845, on adopta un nouveau sabre, plus compact et dont la lame presque droite était plus solide.

    Ce sera le Sabre d'Officier d'Infanterie Modèle 1845.

    La poignée est en corne noire filigranée. La monture se compose d'une calotte courte et d'une garde (ou arc de jointure) à 3 branches accolées ne se séparant que pour former un plateau puis se réunissant à nouveau en quillon enroulé. Le plateau est asymétrique, débordant franchement à gauche sur 4 cm et de 2 cm à droite. Le décor se compose de feuillages enroulés, de lauriers et de fleurettes ajourés.

    Les Sabres Mle 1845 recevront un fourreau en cuir noir à 3 garnitures : chape, bélière et bouterolle, la chape et la bélière étant munis d'un anneau de suspension.

    Le sabre sera décliné en 2 versions légèrement différentes :

    - Le Sabre d'Officier Supérieur d'Infanterie.
    Pour les officiers à partir du grade de Commandant.

    Garde en bronze doré, lame droite à deux gouttières, longue de 86 cm.

    - Le Sabre d'Officier Subalterne et d'Adjudant d'Infanterie.
    Pour les officiers jusqu'au grade de Capitaine et pour les Adjudants et Adjudants-Chef.

    Garde en laiton poli, lame légèrement courbe (flèche d'1 cm) à une gouttière, longue de 77 cm.

    Voici un Sabre d'Officier Subalterne Modèle 1845.
    Celui-ci a été fait par la Maison Coulaux à Klingenthal. Il s'agit d'une commande privée :

    Sabres d'Officier d'Infanterie Modèle 1845/55

    Ces sabres seront bien accueillis, mais leurs fourreaux de cuir montreront leur fragilité. 

    Un fourreau en tôle d'acier, portant deux bracelets pour anneaux de bélière, viendra le remplacer et l'arme sera désormais désignée comme le Sabre Modèle 1845/55. Les Adjudants d'Infanterie conserveront leur fourreau en cuir.

    Voici mon Sabre d'Officier Subalterne Modèle 1845/55 :

    Sabres d'Officier d'Infanterie Modèle 1845/55

    Un fourreau en acier vient remplacer l'ancien fourreau en cuir :

    Sabres d'Officier d'Infanterie Modèle 1845/55

    La poignée en détail.
    L'arc de jointure est composé de 3 branches accolées :

    Sabres d'Officier d'Infanterie Modèle 1845/55

    Les trois branches accolées se divisent :

    Sabres d'Officier d'Infanterie Modèle 1845/55

    Pour former l'ossature du plateau de garde, deux branches à gauche, l'autre à droite.
    Le plateau proprement dit est composé de motifs floraux ajourés :

    Sabres d'Officier d'Infanterie Modèle 1845/55Sabres d'Officier d'Infanterie Modèle 1845/55

    Derrière le plateau, les branches 1 et 3 se rejoignent en un quillon recourbé :

    Sabres d'Officier d'Infanterie Modèle 1845/55

    Le plateau de garde et ses motifs floraux ajourés :

    Sabres d'Officier d'Infanterie Modèle 1845/55

    Mon sabre possède une poignée en corne brune - du plus bel effet - contrairement à la plupart de ses congénaires aux poignées en corne noire ou en ébène.
    Celui-ci a été fait par la Manufacture Impériale de Châtellerault.

    Aux côtés des Sabres 1821, les Sabres Mle 1845 et 1845/55 seront intensément utilisés pendant les différentes campagnes du Second Empire, y compris durant la guerre de 1870-71.

    Après la guerre, les sabres Mle 1845 resteront d'usage courant. En 1882, ils perdront leur deuxième anneau de bélière.
    Le fourreau d'acier poli sera généralisé au fur et à mesure du remplacement des fourreaux en cuir.

    Ce sabre servira encore pendant la Grande Guerre, toujours fabriqué par la Manufacture de Châtellerault ou par des entreprises privées.

    D'une grande élégance, les sabres 1845 auront une belle longévité, ce qui n'est que justice car ce sont vraiment de très belles armes. Témoins de nombreuses campagnes, ces armes racontent l'histoire à leur façon. Pour qui sait prendre le temps de les scruter, elles sont toujours source d'admiration et de respect pour ceux qui les ont portées. 

    Longtemps fabriqués et en grand nombre, on les trouve de nos jours très aisément et pas (encore) trop cher.

    Alors ... à quand le vôtre ?

    Sabres d'Officier d'Infanterie Modèle 1845/55

    À bientôt.


    1 commentaire
  • Après plusieurs mois de calme, nous voici de retour avec une rareté : la carabine de botte.

     

    L'appellation de " carabine de botte " évoque ces armes longues qui étaient tolérées chez les officiers en tant qu’arme personnelle.

     

    Ces armes étaient portées dans un étui en cuir suspendu à la selle juste devant la jambe droite et descendant au niveau de la botte. D’où son appellation. Elles étaient destinées autant à la défense personnelle qu’à améliorer le repas au bivouac … lièvre ou faisan, renard ou marcassin.

     

    Certainement beaucoup plus utile que la paire réglementaire de pistolets 1833, 1836 ou 1842, armes magnifiques, mais … complètement inutilisables au-delà de 20 - 25 mètres. Et encore, s'agissant d'un très bon tireur.

     

    Une Carabine de Botte

     

    Cette petite carabine a été faite dans les années 1860 - 1865 par Etienne VERNAY (ou VERNEY), armurier à Saint-Etienne (Il ne serait pas surprenant qu'il soit apparenté à Claude VERNEY-CARRON, le fondateur de la maison bien connue)

     

    Voici sa description.

     

    L’arme est toute petite : 1,01 mètre.

    Et très légère : 2,75 kg.

     

    Le canon.

    Il est en fer, forgé en damas, octogonal, long de 57,8 cm. 

    Fixé à la monture par une clavette plate et par un crochet prenant sur la fausse culasse.

    Le canon est rayé de 4 rayures plates, larges de 4,8 mm. Le pas des rayures est de 1,30 mètre.

    La longueur rayée est de 56,7 cm.

    Son calibre est de 12,50 mm à fond de rayures et de 11,80 sur le plat.

    L'intérieur du canon est resté miroir et sans accident.

    Le poinçon des armuriers de St Etienne est frappé sous le canon, de même qu'une signature illisible (peut-être Vernay, mais ça ne colle pas trop), un poinçon ovale C, un matricule 45.

    La cheminée est vissée sur une grosse masselotte agrémentée d’une volute décorative débordant sur le haut de la platine.

    La masselotte est pourvue d’un orifice de visite fermant par une vis.

    Sous le canon est brasée une longue pièce en fer se terminant au raz de la bouche par un crochet.

    Cette pièce est destinée à recevoir la baguette de chargement, retenue par deux canaux brasés et bloquée par le crochet.

     

    Les éléments de visée.

    Le canon porte 3 éléments de visée.

    - Un large cran mire fixe en V, brasé sur la fausse culasse.

    - Une hausse réglable composée d’un pied formant cran de mire, supportant une planchette relevante portant 4 crans. 

    Aucune indication de portée. Le pied de hausse est posé à queue d’aronde sur le canon, il est donc réglable en direction.

    - Un guidon à lame, posé par queue d’aronde au bout du canon.

     

    A noter : le cran de mire fixe de la fausse culasse est totalement inutile sur ce canon, car ce cran est masqué par la hausse réglable… 

    Mais sa présence ne peut signifier qu'une chose : un deuxième canon devait exister, dépourvu de hausse, probablement lisse et destiné au tir de grenaille. En effet, le démontage du canon - donc son échange -  est l'affaire d'un instant : sortir une clavette.

     

    La platine.

    Elle est conforme à celles qui équipaient les armes de chasse du temps : ressort en avant, noix à chaînette, bride de noix enveloppante. La platine est retenue d’une part par une unique vis traversant la poignée et d’autre part par un crochet venant s’insérer dans une mortaise de fer fixée à l’intérieur de la monture à l’avant de la platine. Ajustages dans la monture quasiment au centième de millimètre.

    La platine est marquée “VERNAY ET ne“ "A St ETIENNE“ lire : VERNAY Etienne A St ETIENNE

    Le chien à tête de monstre a été anciennement réparé, une soudure du col est encore visible par l'absence de décor gravé.

     

    Les garnitures.

    Elles sont en fer et décorées de rinceaux, feuillages et volutes gravés. Y compris les têtes de vis.

    L’ensemble sous-garde - pontet mesure 29 cm de long, portant le pontet à volute.

    La pièce formant embouchoir porte également une languette à décor gravé longue de 6,5 cm.

    La baguette de chargement longue de 59 cm est en fer, conique, épaisse de 5,3 à 7,1 mm et terminée par un embout large de 11,5 cm. Cet embout comporte un creux de forme ogivale, profond de 5,10 mm. Preuve que l'arme était destinée au tir de projectiles oblongs type Tamisier. A noter que la baguette n'est pas filletée.

    L’ensemble des garnitures et son décor est conforme à la mode du temps pour les armes de chasse.

    Tous les ajustages sont extrêmement serrés.

    Il n’y a pas de bretelle.

     

    La monture.

    Est en ronce de noyer joliment veiné, d’une seule pièce. 

    La crosse proprement dite est de forme “à l’anglaise“ et porte une plaque de couche en fer.

    La monture porte plusieurs éléments en fer, invisibles lorsque l'arme n'est pas démontée : crochet de retenue de la platine, vis de fixation de la sous-garde et de l'embouchoir.

    Ayant traversé près de 160 années, la monture présente quelques traces de coups. La patine du bois est assez atténuée à la poignée et sur le devant.

     

    Conclusion.

    La fabrication de cette carabine est bien plus que soignée.

    Ne parlant pas seulement des gravures ou de la qualité du bois.

    Il s'agit d'un travail d'une très grande rigueur, il n'y a absolument pas le moindre espace entre les pièces bois et fer.

    Une carabine qui a certainement coûté très cher à fabriquer ...  

    Cette arme est restée splendide. Seuls la réparation du chien, une vis remplacée, quelques têtes de vis brutalisées et divers choc du bois témoignent de son âge et de son usage. Il est probable que le canon était bronzé brun, ce qui faisait bien ressortir le damas.

     

    Et maintenant, place au reportage.

     

    Portrait de la carabine, vue de droite et de gauche :

    Une Carabine de Botte

    Une Carabine de Botte

     

    La platine. Encastrements extrêmement serrés.

    Le chien à tête de monstre, on devine la soudure de réparation à l'absence de décor gravé.

    Sous la masselotte on voit la vis fermant l'orifice de visite :

    Une Carabine de Botte

     

    Le marquage d'Etienne VERNAY :

    Une Carabine de Botte

     

    L'encastrement dans le bois.

    On remarquera la mortaise en fer vissée dans la monture et recevant le crochet de retenue de la platine :

    Une Carabine de Botte

     

    L'intérieur de la platine, chien à l'abattu. La qualité de la fabrication se voit ici aussi.

    Sur ces deux photos, on comprend bien le rôle de la chaînette reliant le grand ressort à la noix.

    A l'avant du grand ressort on voit le crochet de retenue de la platine :

    Une Carabine de Botte

     

    Chien à l'armé. Rappelons que le chien est solidaire de la noix par son axe.
    En le tirant vers l'arrière par sa crête, on fait passer le bec de gâchette successivement par les deux crans de la noix : le cran de sécurité puis le cran d'armé. La photo montre le bec de gâchette au cran d'armé.

    On note que la bride de noix est maintenue par 4 vis prenant sur 4 piliers, le dernier pilier formant axe de rotation de la gâchette.

    Une Carabine de Botte

     

    La vis de maintien de la platine et sa rondelle encastrée sur la joue gauche.

    On notera qu'une vis de fixation du support de la clavette de canon a été remplacée :

    Une Carabine de Botte

     

    La hausse réglable.
    Le pied de hausse est encastré à queue d'aronde sur le canon afin d'autoriser un réglage latéral.

    Un coup de burin donne la référence du centre du canon.
    Ce pied de hausse forme un cran de mire fixe. La planchette relevable s'articule dessus.
    On voit bien les 4 crans de mire qu'il propose une fois relevé. Ce type de hausse est apparu sur les premières armes rayées.

    Une Carabine de Botte

     

    Planchette relevée. Le défaut de ce type de hausse apparut rapidement car tout réglage est impossible hormis un choix de 4 crans.
    Les hausses adoptées sur les fusils anglais Pattern 53 ou 60 puis sur le Chassepot français permettront un réglage beaucoup plus fin :

    Une Carabine de Botte

     

    Le guidon à lame, également fixé à queue d'aronde :

    Une Carabine de Botte

     

    Les marquages sous le canon.
    Poinçon C, coup de burin matérialisant l'ajustage de la culasse sur le canon, une signature illisible (peut être refrappée ?) 

    Le poinçon de réception des armes civiles de St Etienne.

    Une Carabine de Botte

     

    La beauté des assemblages, le contraste du bois et des aciers :

    Une Carabine de Botte

     

    L'embouchoir :

    Une Carabine de Botte

     

    La crosse :

    Une Carabine de Botte

     

    L'ensemble pontet-sous garde :

    Une Carabine de Botte

     

    La plaque de couche :

    Une Carabine de Botte

     

    La carabine entièrement démontée mesure seulement 62,5 cm de long :

    Une Carabine de Botte

     

    La bouche du canon, le crochet de maintien de la baguette.

    La baguette, la forme ogivale de sa tête :

    Une Carabine de Botte

     

    L'intérieur du canon et les 4 rayures :

    Une Carabine de Botte

     

    Cette carabine de botte est (bien entendu) destinée à reprendre du service.

    Il faut juste que je trace une ogive afin de commander un moule idoine.

     

    En attendant, je vous laisse l'admirer mais aussi réfléchir au savoir-faire des armuriers des années 1860 ... 

     

    A bientôt !


    votre commentaire



    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires